Bonjours & Bonsoirs Décembre 2019

 
 
 
 
 
 

 
 
L'amour appartient à la nuit
 
Il était minuit passé, le téléphone sonna. Je décrochai avec excitation : c'était la Lune à l’appareil.
Elle souhaitait savoir si je pouvais, encore une fois, aller la voir sur la colline.
Je lui répondis que ce n’était pas un problème, qu’au contraire c’était même un plaisir.
Elle rigola doucement. « À tout de suite ! » me dit-elle avant de raccrocher.
Sans perdre une seconde, je mis mes petites chaussures légères, ma veste bourrée de billets doux que
j’avais écrits toute la journée pour elle, et je partis la rejoindre.
 
La fraîche brise caressa doucement ma nuque, joua tendrement avec mes cheveux.
Brusquement, je levai la tête et l’aperçus. Elle était comme toujours d’une beauté infinie mais d’une jalousie sans pareille.
Elle regarda de travers le vent et lui ordonna sèchement de ne plus me toucher et de partir.
Et soudain, je ne sentis plus un souffle me parcourir. Il ne se l'était pas fait répéter deux fois et était parti effrayé.
Ma compagne me lança tout-à-coup un regard si affectueux qu'il me fit, malgré moi, sourire et agita mon cœur.
 
Après quelques minutes d’impatience, j'arrivai au sommet, le seul endroit de la ville où
je pouvais me trouver au plus proche d’elle, où je pouvais presque la caresser du bout de mes doigts.
Elle brilla plus que jamais. Je l’entendis glousser dans son coin.
Elle tentait de me séduire et elle y arrivait sans difficulté. Je sortis d’une de mes débordantes poches une lettre, au hasard.
 
« Ma Lune, tu n’es peut-être pas une de ces milliers d’étoiles qui t’entourent mais tu es parmi elles la plus belle.
Ton éclat est tel qu’au lieu de m’aveugler il m’éclaire et me fait comprendre que ma vie sans toi ne serait pas la même.
Emmène-moi dans ton monde, ma Lune, je te promets de t’aimer à jamais. »
 
– Bientôt mon rêveur tu pourras me rejoindre, me répétait-elle mystérieusement.
 
Et, comme à chaque fois, je lui lus alors d’autres déclarations, les unes à la suite des autres,
jusqu’au petit jour où elle me souffla délicieusement à l’oreille « À la prochaine... » avant de disparaître.
 
 
 
 
 

Mélodia


Léopold, mon vieil ami,

J'espère que la vie à Salzbourg te convient, et que ta femme et ta fille s'y sont acclimatées au mieux.
On m'a rapporté qu'Anna était enceinte, je vous souhaite donc de tout coeur de voir grandir cet enfant car vous le méritez amplement.

Si je t'écris, c'est malheureusement pour te faire part d'une mauvaise nouvelle.
La pire des nouvelles en réalité : je vais bientôt mourir. 
Les médecins ont analysé mon cas et sont formels, il me reste un mois à vivre tout au plus. 
Je t'envoie donc cette lettre pour me rappeler à ton bon souvenir, et surtout pour te transmettre un fabuleux trésor.
Le coursier t'aura normalement remis un paquet avec cette missive, il contient un objet très important à mes yeux.
Et très important pour toi également, car il fera, à n'en point douter, ta fortune. Cet objet, je te le donne.

Tu es certainement incrédule et avide de découvrir comment un paquet de la taille d'une brique pourrait changer ta vie,
mais avant de l'ouvrir, laisse-moi te raconter comment tout ceci est arrivé.

Tout commença lors de la grande guerre du nord, il y a plusieurs années de cela. 
Mon grade de lieutenant me permettait alors de commander un bataillon de cent hommes. 
Pour ma première mission, nous fûmes envoyés à Hrodna, une ville à l'est. Le commandement de l'opération me fut confié.
Notre mission était d'établir un périmètre de sécurité, en cas d'attaque de l'empire Russe par le flanc ouest.
J'accomplis la mission haut la main, puisque durant les six mois de mon affectation, je ne vis poindre à l'horizon aucune baïonette ennemie.

Je décidais en arrivant d'installer nos quartiers généraux dans le nouveau château,
car nous étions en hiver et qu'il n'était occupé par les nobles de l'époque que durant la période estivale. 
Je pris rapidement goût à ces grands espaces finement décorés, et j'aimais particulièrement m'y promener une fois la nuit tombée.

Les couloirs déserts, passant d'une chambre à l'autre, allumant des feux de cheminée, ôtant les draps des meubles, 
je faisais revivre l'espace d'un instant ces pièces plongées dans l'ombre et le froid. 
Je t'avoue m'être aussi quelques fois pris au jeu de la noblesse, et avoir invité des conquêtes à vivre ces instants de luxe avec moi. 

Un soir où j'étais seul, j'avais jeté mon dévolu sur le petit salon.
Hormis pour admirer les magnifiques draperies qui ornaient les murs, je venais souvent ici pour jouer du clavecin.
Après un concerto exécuté de façon satisfaisante, je me mis à examiner les bibelots que contenait la pièce.
Au milieu des statuettes d'angelots, posé sur un secrétaire, un objet retint mon attention : une petite boîte à musique noire. 
Parfaitement cubique, elle semblait avoir été taillée d'un bloc dans du bois très sombre, probablement de l'ébène. 
Ce curieux objet aux surfaces parfaitement lisses ne laissait pas de doute quant à son utilisation. 
Une clé située sous le boîtier venait se loger dans une ouverture en forme de note de musique.
Après avoir donné un coup de clé j'entendis une mélodie assourdie. Faisant rouler le cube entre mes mains, 
je me rendis compte qu'il ne s'ouvrait pas, je collais donc mon oreille dessus. 
Quelle ne fut pas ma surprise d'entendre, avec un seul et unique tour de clé, une sonate digne du plus grand maître. 
Le tempo, les contretemps, les mélodies, tout était harmonieux.
Pourtant, et malgré mon savoir assez conséquent dans le domaine, je ne saurais dire de qui provenait cette oeuvre.

La boîte mystérieuse venait d'acquérir à mes yeux une grande valeur sentimentale,
je ne me lassais pas d'entendre encore et encore cette musique inconnue.
Lors de mon départ de Hrodna, je décidais d'emporter avec moi ce qui constituera, de ma vie, mon seul et unique larcin. 
Je n'envisageais pour rien au monde de ne plus pouvoir écouter à nouveau cette musique divine. 

À mon retour, je décidais de retranscrire sur le papier les notes entendues. 
Malgré les nombreuses années passées avec toi au conservatoire, et le fait que je connaisse par coeur le morceau de par mes nombreuses écoutes,
ce travail me prit deux semaines. Tu imagines donc la complexité du mécanisme qui devait s'animer dans ce petit bout de bois de dix centimètres de côté.
Une fois mon travail terminé, je décidais de jouer par moi-même la partition anonyme,
qui contenait alors plusieurs pages. Installé au clavecin dans la maison de campagne de mon père,
je posais le cube directement sur la table d'harmonie. C'est alors qu'un phénomène étrange se produisit. 

Dès les premières notes, je sentais s'animer le cube. C'était comme s'il reconnaissait la musique que j'étais en train de jouer. 
Au fur et à mesure du morceau, j'entendais nombre de cliquetis et rouages se mouvoir.
Je faillis alors m'arrêter de jouer, mais le désir de voir ce qui allait se produire était plus fort. 
Approchant des notes finales, je me penchais vers le cube pour mieux comprendre ce dont j'étais l'unique témoin. 
À travers le trou de la serrure, je vis une petite lumière s'allumer et s'éteindre au moment même où
je pressais la dernière note de la partition. Après, plus rien.

Je pris le cube dans mes mains, il était chaud. J'eus alors peur de l'avoir cassé. 
Fébrilement, je portais la clé à la serrure, et donnait un tour.
Déjà, je sentis que quelque chose n'était pas normal, car je ne reconnaissais pas la musique voilée qui s'en échappait.
Portant le cube à mon oreille, j'eus la surprise d'entendre une nouvelle mélodie, encore une fois magnifique, 
et encore une fois totalement inconnue de mon répertoire. A la fin, je tournais à nouveau la clé dans la serrure. 
Deux fois, trois fois, dix fois. La musique qui s'en échappait était cette fois-ci pinçante et guillerette, 
enjouée. Un morceau d'une beauté à faire pâlir les plus grands compositeurs.

À nouveau, je retranscris les notes sur une partition, à nouveau, je les jouais sur mon clavecin. 
La boîte noire réagit de la même façon que la première fois. Des cliquetis se firent entendre durant mon interprétation, 
une lumière clignota dans la serrure à la fin, et, portant le cube à mon oreille, j'entendis une troisième musique, rivalisant d'ingéniosité avec les deux premières.

Durant dix ans, j'ai gardé secrète cette boîte à musique, de peur qu'on ne m'accuse de son vol. 
J'ai consigné pendant ce laps de temps les plus de deux cents morceaux qu'elle a produit.
À présent, je pense qu'il est juste de faire découvrir au monde le génie qui s'en est échappé.
Mais je suis mourant, et je n'aurais que peu de temps pour profiter d'une gloire que je ne mérite pas. 
Je te lègue donc le cube, ainsi que les partitions que j'en ai extraites.
Si tu souhaites me remercier, et j'en serais très honoré, j'aimerais que tu donnes mon nom à ton futur nouveau-né.
Puisse-t-il lui aussi profiter de l'aura d'un tel cadeau.

Ton ami, Wolfgang Amadeus Shäfer.

Marguerite et la mer


De la falaise d'Etretat, la mer s'allonge, ondule, fait le gros dos, rugit, gronde, s'apaise, elle vague à l'âme. 
Elle se claque, elle s'éclate, se projette en milles gouttes d'eau de sel. Un peu, juste un peu sur le grain de la peau de Marguerite, 
du quartz déposé par la vague qu'elle regardait à l'horizon. 
Elle mouille son visage, ses cheveux, sa robe et ses bottines.
Dans son voile d'écume, le soleil se glisse, il irise la soie en eau d'orange, en rouge vermeil, en bleu de cobalt,
coule sur son sein des lanières scintillantes, comme un lacet d'argent noué à l'œillet du ciel. 
Marguerite a 3 ans, peut-être 100 ans de plus. Quelle importance ? 
Elle regarde au loin, les barques de papier de Noël qui glissent, affrontent, au vent qui se lève, la houle, 
les crête successives en eau forte, en fragrances marines. Elle entend la musique du ressac qui ramène au rivage les souvenirs noyés,
les coquillages brisés par la mer en colère. Dans chacune des barques, un homme se tient debout,
la regarde du bout de la mer, lui envoie un baiser avant de plonger dans l'immensité d'une aquarelle maritime et céleste 

Marguerite n'a cessé, tout au long de sa vie, de réparer le cœur des hommes.
Mécanicienne de l'amour, avec ses doigts de fée, ses ailes d'ange, son sourire accroché à la brèche du temps.
Elle avait l'art des horlogers, et des orfèvres : avec son aiguille d'argent et son fil d'or, elle brodait les plaies du cœur, 
elle croisait l'amour avec l'âme. Les cœurs devenaient des tapisseries de Pénélope, où l'histoire des aventuriers déglingués,
des héros sans armure, des colosses fragiles, se racontait de périples fantastiques en amours exaltants. 

Perchée sur sa falaise, les bras à l'horizontale, Marguerite est prête à s'envoler. 
La douleur lancinante qu'elle avait ressenti, au milieu de sa vie et au cœur de ses omoplates, n'était qu'un mauvais souvenir.
Elle avait eu le courage de laisser pousser ses ailes, au prix d'une souffrance ballotée au gré de l'amour, des caprices des hommes, 
des rêves inaccessibles, des éclaboussures colorées de la vie. Elle a vécu intensément bercée par la joie, 
le merveilleux, la beauté ; secouée par la tempête et le fracas de la vie. Les ailes déployées, elle plonge dans la mer et le ciel confondu ; 
elle bat de l'aile pour atteindre les barques de papier mâché, se jeter dans les bras des Dieux de pacotille, l'inaltérable mot Aimer tatoué sur son front.

Un petit tour dans les airs


Aujourd'hui, Thémistocle s'est envolé.
Non pas envolé dans le sens « disparu et on ne sait pas où il est »,non. Thémistocle s'est envolé dans le ciel, littéralement.
Il n'est pas non plus monté au paradis, dans le sens « vers le ciel, il est mort ».
Non, ce n'est pas cela non plus.
Ce que je veux dire, c'est que ce matin il est sorti de sa maison, il s'est haussé sur la pointe des pieds, 
a levé ses bras et les a agités un peu au-dessus de sa tête, comme pour vérifier que ça fonctionne,
vous savez, comme le font les avions avant le décollage. Il a agité ses bras comme ça et s'est envolé au-dessus du chemin, 
au-dessus des arbres, au-dessus des maisons.
Maintenant, il nage dans le ciel et c'est un peu surprenant quand même !

Il a commencé par faire la brasse, puis le crawl et finalement, il bat l'air avec ses bras, de haut en bas, de bas en haut.
Un moineau le rejoint, stupéfait.
— Bonjour, moineau.
L'oiseau vole un instant à ses cotés, puis virevolte autour de lui en pépiant.
Thémistocle lui répond (il crie un peu au début, car la vitesse provoque chez nous cette tendance à hurler) :
— Oui oui, c'est très étrange... Vous avez raison l'ami oiseau. Je suis un homme qui vole...
Excusez d'ailleurs ma maladresse, je ne suis pas encore très agile, ni très rapide. (pépiement de l'oiseau) 
Merci merci, mais non, vous me flattez ! Voyez-vous, j'en ai eu envie... et puis, ce n'est pas si compliqué tout compte fait, 
n'est-ce pas, ça vient tout seul. On s'habitue...
Un deuxième moineau suivit d'un rouge-gorge accompagnent maintenant notre bonhomme qui vole.
— Il est vrai que c'est d'autant plus surprenant que je ne possède pas d'ailes.
On a toujours cru nécessaire d'avoir des ailes pour pouvoir voler. Je constate que les bras suffisent... 
Vous avez véritablement un point de vue magnifique de cette hauteur ! A quelle altitude sommes-nous donc ?... 
Non, vraiment ?! Ne m'effrayez pas, je risque de me retrouver par terre ! 
Attention, chers amis, gare ! Faites un peu de place pour un gros balourd comme moi...
Une nuée d'oiseaux, maintenant, volettent autour de Thémistocle.

A présent, Thémistocle commence à songer que voilà un moment qu'il évolue dans les airs de cette façon,
et qu'il doit être bien loin de sa maison, peut-être même de son village ou de son pays.
Les oiseaux qui l'accompagnaient tout à l'heure ont commencé à le quitter, par désintérêt peut-être, 
ou pour s'en retourner à leur tâches et occupations habituelles (et Dieu sait qu'ils en ont !).
Le ciel s'est assombri et Thémistocle s'essouffle.
Le fait de ne pas savoir comment atterrir l'ennuie bien un peu, mais le plus grave serait d'oublier l'heure du potage.
— J'ai été sincèrement honoré de voler en votre compagnie, moineau, mais c'est l'heure du dîner et je dois rentrer... Bonsoir !

Thémistocle se retourne et rentre dans sa cabane.

Vendredi 6


La tête dans les nuages


Tristan avait sept ans. Il passait le plus clair de son temps seul, à attendre entre les quatre murs grisâtres de sa chambre. 
Son seul passe-temps était de s’asseoir sur son lit et d’observer le ciel et les nuages qui passaient devant sa fenêtre. 
Au fil du temps, ils étaient un peu devenus ses confidents. Il leur racontait son quotidien, ses rêves, mais surtout,
il leur contait les histoires merveilleuses qu’il aimait inventer. À chaque fois, les nuages s’arrêtaient devant sa fenêtre, 
comme si le vent avait cessé de les entraîner dans sa course, comme s’ils voulaient l’écouter.
Puis, lorsque le petit garçon arrêtait de parler, ils reprenaient leur voyage jusqu’à l’autre bout du monde.

Un jour, alors qu’il venait de se réveiller et peinait encore à se redresser sur son lit, 
Tristan eut la sensation que tout tremblait autour de lui. Il parcourut la petite pièce du regard et n’en crut pas ses yeux. 
Les quatre murs de la chambre grise se rapprochaient de lui, lentement. Le petit garçon était pétrifié. Inexorablement, la chambre rapetissait. 
Il lança un regard désespéré vers la fenêtre ouverte, et elle apparut. Une fillette aux boucles blondes qui se déplaçait à dos de nuage. 
Elle tendit la main au garçonnet pour l’aider à grimper sur sa monture céleste et
ils s’enfuirent au galop tandis que les murs se refermaient sur la fenêtre de la petite chambre grise. 

Tristan n’en revenait pas. Il volait. Assise en tailleur face à lui, la fillette souriait de toutes ses dents.
Elle s’appelait Gabrielle. Elle passait le plus clair de son temps seule, à voyager entre les quatre coins du monde. 
Et un jour, elle avait entendu parler de Tristan. C’était les nuages qui lui avaient raconté. 
Alors elle était venue le chercher avant qu’il ne soit définitivement enfermé dans cette horrible chambre.
Le petit garçon l’écoutait parler et n’en revenait pas. Le nuage sur lequel il était assis était doux, cotonneux et bien plus confortable 
que l’affreux matelas sur lequel il dormait. Il jeta un œil autour de lui. Déjà, les nuages commençaient à se rassembler autour d’eux.
Ils étaient curieux et voulaient observer le nouveau venu. C’était des cumulus de beau temps, blancs et moutonneux et ils étaient de plus en plus nombreux. 
Si nombreux qu’ils commencèrent à se bousculer. Ils obscurcirent le ciel, et leur blanc immaculé prit une teinte grise menaçante. 
Ils s’entrechoquaient maintenant, tant et si bien que les frottements produisirent un coup de tonnerre assourdissant qui fit sursauter le petit garçon. 
Un éclair jaillit, rapide, lumineux, puis un autre. Gabrielle leur cria de se calmer sur-le-champ. Et les nuages obéirent instantanément. 
Certains s’en voulaient beaucoup de cette bousculade et se mirent à pleurer, déversant un torrent de larmes sur tout ce qui se trouvait en dessous.
Puis, petit à petit, ils se séparèrent, et reprirent leur couleur d’origine. Gabrielle retrouva son sourire et leur fit un signe de la main. 
Plusieurs d’entre eux se rassemblèrent alors en un énorme nuage qui prit la forme d’un magnifique dragon. 
De sa bouche s’échappait une flamme blanche qui venait éclairer des couples dansant au son de tambours fabuleux.
Plus loin, un homme bedonnant au visage rieur semblait raconter une anecdote qu’une assemblée applaudissait joyeusement. 
À côté d’eux se tenait un loup très distingué qui portait un monocle. Adossée sur l’une de ses pattes arrières, une belle jeune femme souriait d’un air pensif.
Elle attendait sûrement ce beau prince à cheval qui tentait de la rejoindre en se frayant un passage parmi une horde d’oppressants fantômes. 
Émerveillé, Tristan reconnut toutes les histoires qu’il avait contées aux nuages durant ses longues journées de solitude.
Elles prenaient vie sous ses yeux comme par enchantement. Il était tellement transporté qu’il n’avait pas entendu que Gabrielle s’était mise à parler : 
toutes les histoires qu’il avait racontées avaient tellement fasciné les nuages qu’ils avaient décidé de lui offrir un cadeau. 
Chaque jour, il verrait un nouveau conte se matérialiser devant lui. Chaque jour, la fillette viendrait le chercher.
Pour rompre leur solitude à tous les deux. Chaque matin, tant qu’il y croirait, elle empêcherait les murs de sa chambre de se refermer sur lui.
Tristan prit ses mains dans les siennes et la remercia de tout son cœur. Les larmes lui montaient aux yeux. Gabrielle sourit encore. 
Toutes ses émotions avaient dû l’épuiser. Elle l’invita à se reposer un instant.

Tristan se réveilla dans sa chambre grise. Il était assis sur une chaise, accoudé à la fenêtre par laquelle il aimait tant regarder.
Quand la dame de chambre entra, elle poussa un cri de surprise :
« Mais comment as-tu fait pour atterrir ici mon garçon ? »
Elle accourut vers lui en poussant la chaise roulante. Elle prit le garçonnet dans ses bras pour l’asseoir dessus, 
en prenant bien soin d’installer ses jambes inertes sur le repose-pied. 
« Sérieusement, mon enfant, pourquoi ne m’as-tu pas appelée pour que je te porte jusqu’à la fenêtre plutôt que de t’y traîner tout seul ? »

Tristan souriait. Il fit un signe de la main en direction de la fenêtre. Il attendait le lendemain avec impatience.

Mon ange


En classe, il était assis près de moi. Je lui faisais une place en bout de banc. Il était invisible. Mais il était là. Je crois que c’est ma grand-mère qui m’avait dit ça : « Tu as un ange gardien. » Je l’avais crue. Une grand-mère dit toujours la vérité. Surtout la mienne. Le mensonge lui avait fait beaucoup de mal. Elle ne l’aimait pas. Elle le détectait, le fuyait, le détestait. Mon ange gardien était beau. Il était tout blanc avec des yeux de bonté. Il ne regardait que moi. De grandes ailes cotonneuses lui remplissaient le dos. Il ne pouvait pas s’appuyer contre le dossier de la chaise. J’essayais de me pousser le plus possible car je pensais à l’envergure de ses belles plumes. Mon ange me protégeait. Il me protégeait car je ne réussissais plus à le faire toute seule. Ils étaient trop nombreux. Je sentais leurs regards de chasseurs. J’entendais leurs chuchotements et leurs rires étouffés d’hyènes. Je devinais leur férocité et leur excitation. Tout à l’heure, dans la cour, j’allais être leur proie. Mon ange savait tout ça. Il était venu à la rescousse. Je n’avais pas besoin de lui parler. Mon ange était très grand. Je sais qu’il venait du ciel juste pour moi. Il avait le même nom que moi : Pascal. Mon ange souriait beaucoup. Je ne voyais pas ses sourires mais je savais qu’ils étaient doux. Parfois, je tendais la main droite vers le vide de mon banc pour le toucher un peu. J’avais besoin d’un ami. J’avais besoin de consolation. Mon ange me suivait partout. Il marchait juste derrière moi, comme une ombre blanche. Parfois, je me retournais d’un coup en lui faisant un clin d’œil. J’imaginais qu’il me percutait, passait à travers moi. J’écoutais mon corps, à l’affût de ses ondes. Il ne fallait pas que j’oublie qu’il était là. Quand j’oubliais, je me recroquevillais en rasant les murs. J’avais peur de tout. Quand je n’oubliais pas, je respirais mieux. J’affrontais les regards. Un jour, mon ange a disparu. Je me souviens de ce jour-là. Non plus invisible mais totalement absent. Le bout de mon banc était vide. Le ciel avait rappelé Pascal. J’étais seule. Seule. Seule. Et recroquevillée. Les hyènes allaient sentir de plus belle mon désarroi. Je me souviens de ce sentiment d’abandon, de nudité. Plus d’ondes dans mon corps. Plus de collision angélique. Je suis rentrée chez moi sous les bruyantes moqueries. Tout était fini. 
Ce jour-là, mon père et ma mère m’attendaient à la maison avec leur beau sourire. Un grand carton à trous-trous s’offrait au milieu du salon. Il y avait là quelque chose pour moi. Quelque chose d’extraordinaire. Mes parents n’avaient jamais autant souri. J’ai ouvert la boîte avec des gestes tremblants. Un jeune chat tout cotonneux avec des yeux de bonté attendait qu’on l’accueille au creux des bras. Je l’ai serré contre moi avec des pleurs et des rires. J’ai senti les ondes de son petit corps. J’avais besoin d’un ami, j’avais besoin de consolation. Mon chat était beau. Il ne regardait que moi. Il était venu me protéger car je ne réussissais plus à le faire toute seule. Je lui faisais une place au creux de mon lit d’enfant. Je tendais ma main pour toucher le soyeux de son pelage. Mon chat me suivait partout. Il marchait derrière moi comme une ombre blanche. Un ange...

 















 

 
 
 
 

Bon mercredi ,sous la pluie pour nous .

It’s raining today comme dit l’ami Sukalu.

Ah oui !!!!Vendredi 13 !!!!!

Merci pour ce petit déj Roberto ,bon samedi aussi .Beaucoup de vent chez moi .

Ouf sapin de noël fait ,m'y suis attelée ce matin à 5 h ,d'année en année ça devient un supplice de faire un sapin ,mais bon je le fais pour les 2 petits .

Lundi sera le grand jour ,le sapin de 3 mètres arrive .Un beau VAL'HOR nordmann du Morvan .La déco ,c'est sympa ,même si c'est long ,mais le démontage est un peu dur . Environ 10 sacs poubelles de 100 litres et deux ou trois heures de boulot . C'est Noël une fois par an après tout .

Bonjour Roberto ,bonne journée à toi aussi ainsi qu'à tout le monde .

Ici nous avons l'impression d'être au printemps .

Bon courage à ceux qui sont dans les gréves ,pas de souci dans mon bled .

Les emmerdements sont toujours pour les Parisiens. Gilets jaunes,embouteillages,défilés. Un seul exemple :ma fille met une heure et quart le matin et même chose le soir. Il pleut en ce moment. 10 manifs par jour en moyenne avec des pointes à 25. C’est la loi de l’emmerdement maximum.