Des plantes éclairantes
Un couple de chercheurs lorrains a mis en évidence la possibilité de créer des plantes qui éclairent sans consommer d’énergie.
Révolutionnaire.
Un autre projet de plantes lumineuses est développé à Las Vegas, aux États-Unis.
« Mais il n’a rien de comparable. La luminescence de leurs plantes est à peine perceptible »,
indiquent Rose-Marie Auclair, originaire de Lacroix-sur-Meuse, et Ghislain, son mari, originaire de Thionville en Moselle.
Par Jean-Marc Toussaint
Imaginez-vous entouré de plantes et d’arbres luminescents. Ils pourraient remplacer avantageusement la lampe d’ambiance de votre salon ou le candélabre du coin de la rue qui crachote une lumière blafarde où viennent s’étourdirent les insectes nocturnes. Vous pensez qu’il s’agit là de pure science-fiction ? Deux jeunes Lorrains trentenaires, diplômés de l’université de Strasbourg, Rose-Marie et Ghislain Auclair, respectivement docteur en biologie moléculaire et en génétique, sont convaincus du contraire. Depuis deux ans, ils travaillent en biologie synthétique pour créer des plantes luminescentes. Leurs travaux ont permis de mettre en évidence la possibilité de reproduire en laboratoire le gène qui entraîne la bioluminescence de certains insectes ou poissons. Mieux, les deux chercheurs ont montré qu’il était possible de transférer cette propriété aux plantes. En clair, d’apporter un élément naturel connu au génome des cellules végétales qui vont ensuite se multiplier pour former un élément vivant multicellulaire. En biologie, on appelle cela la totipotence.
« Le principe n’est pas nouveau, mais les outils d’aujourd’hui permettent de modifier dans le génome exactement ce que l’on veut », explique Ghislain Auclair.
« Il y a un vrai problème d’accompagnement des jeunes entrepreneurs avant d’arriver en pépinière »
Quelle peut être la puissance lumineuse de ces plantes ? Là est toute la question. Les deux chercheurs estiment que l’intensité peut être boostée. Mais évidemment pas au point d’éclairer un stade olympique. « Nous pensons en revanche que pour les lampes d’ambiance, l’éclairage des vitrines ou les abords des entreprises, les plantes luminescentes peuvent potentiellement remplacer l’éclairage traditionnel », résume Rose-Marie Auclair, qui y voit également le moyen de ramener la nature dans la ville. Ces travaux ont valu aux deux chercheurs lorrains d’être primés dans plusieurs concours nationaux. Des investisseurs sont disposés à les accompagner, mais ils veulent maintenant une preuve du concept. Ce qui va obliger le couple à retourner en laboratoire pour une période de 18 à 24 mois. « On a perdu beaucoup de temps pour engager cette ultime étape. Notre statut ne nous permet plus aujourd’hui d’utiliser les labos de l’université, mais en même temps, nous n’avions pas l’argent pour louer les services d’un labo privé. Pour avoir le soutien d’investisseurs, il fallait d’abord finaliser nos travaux. C’était un peu kafkaïen », explique Ghislain Auclair, qui a découvert qu’il n’était pas le seul dans ce cas de figure. « Il y a un vrai problème d’accompagnement des jeunes entrepreneurs avant d’arriver en pépinière », observe-t-il. De fait, ces mois de galère n’auront pas été totalement inutiles, puisqu’il a fini par convaincre l’université d’Alsace de se pencher sur la question. Résultat, un nouveau labo dédié à la recherche entrepreneuriale va ouvrir en janvier dans les locaux de l’école de biotechnologie d’Illkirch et divers fab lab vont être créés en parallèle pour développer un réseau pluridisciplinaire. Le projet de plantes bioluminescentes est d’autant plus intéressant qu’il est totalement sous contrôle. En d’autres termes, les plantes sont stérilisées pour ne pas pouvoir générer de graines.