Les taxis de la Marne acheminant 6 000 soldats sur le front, les 6, 7 et 8 septembre 1914, ont contribué à stopper la percée allemande vers la capitale. Ce que l’on sait moins, c’est que cette équipée leur a été payée comme une course normale, au compteur. Les taxis avaient été réquisitionnés par le général Gallieni, gouverneur militaire de Paris. Il fallait donc les indemniser : l’armée leur a versé environ 70 000 francs au total
Tout le monde n’a pas touché la même somme, car certains compteurs affichaient 120 km parcourus, d’autres plus de 200 km. De nombreux chauffeurs ont en effet effectué deux allers-retours entre la gare de Gagny, où les troupes étaient embarquées à bord des voitures, et Nanteuil-le-Haudouin ou Silly-le-Long, à quelques kilomètres du front. A leur retour au garage, les compteurs ont été soigneusement relevés. Certains affichaient plus de 100 francs de course, soit dix jours du salaire d’un ouvrier .
Pour ce prix, les taxis ont transporté souvent 5 soldats, chacun avec son barda de 30 kilos : l’un assis à côté du chauffeur, et trois ou quatre autres à l’arrière. Certains soldats ont même voyagé sur le marchepied des voitures. Sans grand danger, puisque la vitesse moyenne ne dépassait guère 25 km/heure et que la météo était clémente.
La plupart des voitures étaient des Renault AG ou AG1, sur lesquelles était installé un compteur appelé «taxamètre» ou «taximètre», mesurant à la fois la distance parcourue et le temps passé à bord. Une invention toute récente : elle datait de 1903. Comme ils transportaient plus de trois personnes et qu’ils se déplaçaient hors de Paris, les chauffeurs appliquaient le «Tarif 2» : 75 centimes pour les 750 premiers mètres puis dix centimes tous les 250 mètres (et, à l’arrêt, 2,50 francs de l’heure).